22 juin 1983. Emanuela Orlandi, 15 ans, sort de son cours de musique à Rome. Elle laisse deux amies à un abribus et poursuit son chemin à pied. Emanuela ne rentrera jamais chez elle.
Quarante-deux ans plus tard, le mystère demeure entier. Son père, Ercole Orlandi, est huissier au Vatican, chargé d'accueillir les visiteurs venus rencontrer le Pape. La famille n'a pas de fortune personnelle.
La théorie de l’enlèvement est la plus plausible. Plusieurs hypothèses circulent : Emanuela aurait été kidnappée par la mafia pour faire pression sur le Vatican en raison d'un prêt, ou pour forcer les autorités à libérer Mehmet Ali Agça, l'homme qui a tenté d'assassiner Jean-Paul II, voire encore pour satisfaire les demandes du KGB visant à faire chanter le pape polonais.
Quoi qu'il en soit, quelques jours après la disparition d’Emanuela, le Pape Jean-Paul II lance un appel aux "responsables de la disparition". Étrangement, la thèse de l’enlèvement n’avait pas été rendue publique, suscitant des interrogations : pourquoi un appel aux ravisseurs si le Vatican n’était pas au courant ?
En 2013, Pietro Orlandi, le frère d'Emanuela, exprime son trouble après une rencontre avec le Pape François, durant laquelle celui-ci aurait déclaré à deux reprises : « Emanuela est au ciel ». En langage catholique, cela sous-entend qu’Emanuela est morte et au paradis. Cela semble indiquer que le Vatican connaît la vérité, mais malheureusement, le Pape a toujours refusé de rencontrer la famille Orlandi, malgré sa demande d’audience. Il est dingue de savoir que le Pape reçoit volontiers des célébrités et des chefs d'État, mais refuse de rencontrer une famille citoyenne de l’Etat du Vatican en quête de réponses.
Une autre hypothèse suggère qu’Emanuela n’a jamais quitté le Vatican et que son enlèvement serait lié à un scandale interne. En 2012, un prêtre anonyme a affirmé qu’elle aurait été victime d’abus sexuels au sein du Saint-Siège, et que sa disparition aurait été orchestrée pour cacher ces faits. Il a été sous-entendu qu’elle aurait été envoyée dans un couvent au Luxembourg sous une fausse identité.

Affiche collée sur tous les murs de Rome
Le témoignage de Sabrina Minardi, ancienne compagne d’un baron de la mafia romaine, Enrico De Pedis, dernier chef de la Banda della Magliana, jette également le trouble. Elle prétend avoir vu Emanuela durant sa séquestration et accuse le cardinal Marcinkus, ancien président de la Banque du Vatican, d'avoir orchestré son enlèvement.
Le secret de la disparition de la jeune fille semble bien gardé par le Vatican. Pietro Orlandi pense que le crime organisé, l'Église et la politique sont impliqués dans la disparition de sa sœur. Un journaliste du Corriere della Sera a rapporté qu’une source lui a confirmé que l’affaire "Emanuela Orlandi" n’avait rien à voir avec le terrorisme, et que cette idée ne visait qu'à détourner l’attention du Vatican. Lequel a, bien sûr, démenti ces allégations.
Le 11 juillet 2019, à la suite d’une lettre anonyme mystérieuse reçue par la famille Orlandi, des fouilles ont été autorisées par le cardinal secrétaire d’État et numéro deux du Vatican. Elles ont eu lieu dans un cimetière du Vatican pour retrouver les possibles restes de la jeune fille disparue. Malheureusement, les deux tombes ouvertes étaient vides, ravivant les spéculations.
Un journaliste d'investigation, se basant sur des documents non authentifiés du Vatican, évoque des sommes importantes que le Saint-Siège aurait versées pour le logement de la jeune femme. Emanuela aurait été extradée et aurait vécu quatorze ans dans une mission catholique à Londres, où elle serait finalement décédée. Bien sûr, sans preuves concrètes, tout cela reste hypothétique.
Le 10 janvier 2023, le Pape François demande officiellement que le Vatican et le Parquet de Rome réexaminent la disparition d'Emanuela Orlandi. Mais après quarante ans, de nombreux protagonistes sont décédés, rendant difficile la découverte de la vérité. Une chose semble cependant certaine : le Vatican connaît la vérité et il se garde bien de la divulguer.
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